Dans les passages de son ouvrage qui ont été ici retenus, l’auteur décrit le fonctionnement du Tribunal des Eaux de Valence (Espagne) qu’il a étudié durant les 22 ans passés dans cette ville. Il met en valeur le caractère irremplaçable de ce tribunal, car il s’agit pour lui de le défendre au moment (décembre 73) où un projet de loi organique relative à la justice est paru dans le Bulletin des Cortes espagnoles, visant à la suppression des juridictions spéciales, au nom du principe de l’unité de juridiction. Ce même danger a menacé le Tribunal en 1812 et l’auteur reproduit l’intervention du député de Valence de l’époque en faveur du Tribunal. Ce Tribunal, que l’on fait remonter à l’année 960, trouve sa source dans les Ordonnances des huit communautés des canaux de la plaine de Valence (XVIII siècle). Il siège tous les jeudis à midi devant la porte des Apôtres de la cathédrale de Valence pour juger les affaires relatives à l’utilisation de l’eau dans une zone couvrant plus de 9000 hectares. Les juges de chacune des huit communautés concernées sont nommés démocratiquement parmi les agriculteurs. Non diplômés en droit, il connaissent cependant parfaitement le droit de l’irrigation de la région. Il n’y a pas d’avocats pour ces procès qui comprennent trois phases, sont publics et oraux. Les jugements sont rendus par le Tribunal en dernier ressort. Cette procédure n’a pas connu d’altération depuis plus de mille ans. L’auteur insiste sur l’autorité et le prestige du Tribunal des eaux. En 22 ans, il n’a jamais vu sont autorité remise en cause et il note que dans 99 pour cent des cas, les sentences sont exécutées volontairement et immédiatement. La procédure est courte, une semaine en général et d’un coût peu élevé. Pour l’auteur, il s’agit d’une juridiction atypique, entre une juridiction civile et une juridiction adminis-trative. Le Tribunal et sa procédure, avec tout le prestige dont ils jouissent, répondent selon lui au principe moderne de socialisa-tion, en faveur de la paix juridique. Cette juridiction hautement spécialisée dans des problèmes relatifs à une situation bien particulière est indispensable et constitue l’exemple mondial de ce que doit être un procès civil : rapide, adapté, peu cher.