Dans la région de Puira, les paysans étaient confrontés à des problèmes de vol de bétail : un vol non pas organisé, comme dans d’autres régions, mais un vol entre voisins. Or, les communautés étant peu importantes, aucune forme d’organisation ne permettait de faire face à ces problèmes. Des éleveurs demandent au Ministère de l’Intérieur l’autorisation de s’organiser en "rondas", comme celles de Cajamarca. Devant son refus, ils créent un "Comité de défense des agriculteurs et éleveurs des provinces de Huancabamba et Ayabaca en 1983. D’autres "rondas" apparaissent et ce comité compte aujourd’hui 14 000 membres organisés. Toutes les "rondas" ont une caractéristique commune : leur activité ne se restreint pas à la lutte contre le vol du bétail. Celui-ci a d’ailleurs quasiment disparu. L’exemple du district de Frias montre comment la "ronda" intervient pour résoudre les conflits quotidiens : elle désarme les gens avant les fêtes par exemple, elle contribue à résoudre les conflits dans le cadre d’une assemblée publique par la recherche de conciliation entre les parties. Les "ronderos" sont très rarement dénoncés devant le pouvoir judiciaire pour usurpation de fonction (sauf dans le cas de dénonciation par les autorités étatiques elles-mêmes) car les paysans reconnaissent l’autorité de cette organisation qui leur est proche. Les résultats d’une enquête réalisée dans le district de Frias auprès de 102 familles en mai 1989 témoigne de la confiance des habitants dans la justice de la "ronda" : pour plusieurs problèmes (vol, bagarres, injures, dommages subis par des biens ou des animaux), entre 85 et 95% des familles suivant les cas se tourneraient vers la "ronda" et non vers les autorités étatiques. Les "rondas" commencent à viser d’autres objectifs : le développement et l’amélioration des conditions économiques. Dans leur conclusion, les auteurs insistent sur le fait que les "ronderos" ne cherchent pas à combattre l’état mais à surmonter leur marginalisation, à participer ; et la "ronda" crée des conditions sociales et des structures nécessaires pour cette lutte politique, même si jusqu’à présent elle doit se consacrer principalement à résoudre les conflits entre paysans.