Parmi les rôles des services juridiques en Amérique Latine, l’éducation et la formation juridiques populaires ont occupé une place très importante, et cela jusqu’à nos jours. Après une première approche de l’information juridique, il fallait réfléchir à la méthodologie à utiliser dans le travail éducatif : quelle était la plus appropriée, la plus pédagogique. Nous allons parler ici de quatre expériences d’utilisation de ces outils pédagogiques. QUERCUM (Chili) a développé plusieurs types d’instruments éducatifs. DOAL (Mexi-que) a produit des manuels de divulgation juridique utilisés également pour la formation de parajuristes. Finalement, deux organisa-tions de femmes : INDESO-MUJER (Argentine) travaillant à partir d’une publica-tion périodique, et CIDEM (Bolivie) avec une série de manuels sous la forme de bande dessinée. 1) QUERCUM (Centro de Desarrollo y Estudios JurÃdicos = Centre de Développe-ment et d’Etudes Juridiques), Santiago du Chili. Inscrits dans un programme global de sensibilisation, éducation et formation juridique, une diversité d’outils pédagogiques répondent à la diversité de la réalité. Ainsi par exemple : le théâtre juridique, la radio, les manuels d’éducation juridique populaire, les romans photo... Dans le cas du théâtre juridique, Quercum travaille avec des acteurs populaires, issus de la communauté, qui y participent bénévolement. La radio est un autre moyen ; l’émission "Sincedazo : todos podemos legislar" (Sans tamis : nous pouvons tous légiférer) qui a lieu tous les samedis à midi, invite les divers acteurs sociaux à partager un débat sur un thème juridique d’actualité. Quant aux manuels d’éducation juridique, ils ne sont pas destinés uniquement à la vulgarisation ; ils impliquent surtout une analyse critique de la situation traitée (car sous la dictature, vulgariser la loi équivalait à vulgariser l’injustice). Ils servent aussi à analyser la réalité actuelle du processus de démocratisation : "Seguridad del ciudadano y justicia comunitaria" (Sécu-rité du citoyen et justice communautaire), pour aller au-delà de la conception policière de la sécurité : éthique communautaire et auto-gestion civile ; "Yo participo, tú partici-pas..." (Je participe, tu participes...), une analyse critique de la commune actuelle, avec des propositions pour faire évoluer l’organisation politique ; "Las magias del mago MaguÃn" (Les tours de magie du magicien MaguÃn), un conte pour expliquer les origines dictatoriales de la Constitution en vigueur. 2) DOAL (Despacho de Orientación y AsesorÃa Legal = Bureau de Conseil et d’Assistance Juridique), Mexico D.F. La formation inclut l’élaboration et la diffusion de manuels de divulgation juridique. DOAL a déjà publié 13 cahiers ou manuels de formation, dont les thèmes sont : formes privées et collectives de propriété urbaine, les programmes d’accès au logement, la coopérative de logement ; la régularisation des titres de propriété de la terre, le droit des locataires, le droit d’association, la procédure pénale, les droits et garanties constitution-nels, l’habeas corpus... DOAL a également préparé des matériaux tels que puzzles, affiches, et un jeu appelé le "maratón jurÃdico popular" (marathon juridique populaire). 3) Les droits des femmes : INDESO-MUJER (Instituto de Estudios JurÃdico-Sociales de la Mujer = Institut d’Etudes Juridiques et Sociales de la Femme), Rosario, Argentine, et CIDEM (Centro de Información y Desarrollo de la Mujer = Centre d’Informa-tion et de Développement de la Femme), La Paz, Bolivie. Parmi les outils pédagogiques de INDESO-MUJER, "La Chancleta" (désigne en espagnol les vieilles chaussures portées par les femmes) est une revue à thème qui, associant le texte de divulgation et de démystification du droit aux dessins d’animation pédagogique, traite les problè-mes vécus par les femmes des couches populaires (viol, concubinage, divorce, autorité parentale...). CIDEM, membre de la "Coordinación de la Mujer" (Coordination de la Femme) et deux autres organismes, ont préparé la série de manuels "Nuestras Leyes" (Nos lois), qui présente les problèmes courants que les femmes des secteurs populaires doivent affronter en Bolivie. Sous forme de bande dessinée, sont traités les codes pénal, civil, de la famille, du travail. Ces cahiers ont été préparés à partir de témoignages de femmes.