Le rôle de l’état de droit et des droits de l’homme dans le processus de développement est généralement peu traité. Le droit reflète les conditions sociales de domination et perpétue la marginalisation des majorités populaires. L’auteur rappelle cependant que le contenu et les limites du droit sont déter-minés par les confrontations politiques ; le droit peut donc être utilisé aussi comme instrument de changement social, et des droits peuvent être conquis par les classes dominées même dans les conditions actuel-les. Les services juridiques peuvent ici intervenir pour aider les populations pauvres à renforcer leur organisation, articuler leurs intérêts et revendiquer des droits individuels et collectifs. Deux types de services juridiques sont opposés ici : - les services juridiques "conventionnels", qui découlent de projets américains des années 60 et 70. L’échec de ces programmes, qui consistaient principalement à former des étudiants en droit, découle de la non prise en compte du fait que dans ces pays, le droit n’est pas neutre mais correspond souvent à l’intérêt de certains groupes sociaux. Négli-ger les aspects culturels, sociaux et ethniques du droit a abouti à une conception technique du droit qui a pu paradoxalement être reprise par les dictatures latino-américaines. - les projets de services juridiques "innova-teurs". Ils se sont, eux, développés dans les dix dernières années en Amérique Latine et en Asie comme des instruments de démocratisation du pouvoir politique et de changement des conditions économiques et socio-politiques. Ces programmes visent à renforcer les organisations populaires et à influencer les autorités étatiques. L’auteur distingue les services juridiques qui s’adressent aux organisations populaires, en exposant pour chaque groupe (petits paysans, minorités ethniques) les problèmes auxquels sont confrontés les services juridiques et leurs actions, et les autres services juridiques : organisations de droits de l’homme, programmes d’éducation sur les droits de l’homme, formation de magistrats profession-nels et de juges de paix. Ces derniers notam-ment sont très importants : ils représentent 82 pour cent des juges actuels au Pérou et ne sont pas des professionnels du droit mais sont proches de la population et ont sa confiance. En analysant les dangers auxquels sont confrontés ces services juridiques innova-teurs, leur portée et leurs limites, l’auteur insiste notamment sur la nécessité de deman-der une contribution financière, même symbolique à la population afin de valoriser l’aide reçue, ainsi que sur la nécessité d’améliorer la coopération et les échanges d’expériences entre organismes au niveau national et international.