Mission Locale de La Ciotat
Une Mission Locale (ou PAIO) est une structure dont la finalité est l’insertion sociale et professionnelle des jeunes âgés de 16 à 25 ans. Les Missions Locales s’appuient sur une approche globale du jeune. Elles sont financées par les collectivités locales et l’Etat et existent principalement sous forme associative ou de GIP (Groupement d’Intérêt Professionnel). L’action “ prévention des discriminations dans le monde du travail ” En 2001, la mission Locale de La Ciotat a initié une dynamique de prévention des discriminations dans le monde du travail. Nos actions se sont tournées vers les acteurs auprès desquels notre structure bénéficie d’une certaine légitimité, à savoir les acteurs de l’insertion et les jeunes. L’enjeu était de créer une prise en compte du phénomène de discrimination par les acteurs de l’insertion, en proposant dans un premier temps des modules de formation, puis en mettant en place un groupe de travail. L’objectif au niveau des jeunes en parcours d’insertion était de leur faire connaître leurs droits et de les accompagner, au travers de deux actions : - la sensibilisation collective des jeunes sur le dispositif national de lutte contre les discriminations ; - la mise en place d’une permanence d’information juridique en droit du travail et la sensibilisation des acteurs orientant les jeunes sur cette permanence à la question de la discrimination. Un contexte, une hypothèse, un constat La discrimination dans le monde du travail, qu’elle soit fondée sur le sexe, la race ou l’apparence physique, est restée pendant longtemps un phénomène mal connu car difficilement mesurable. La prise de conscience progressive des problèmes liés à la discrimination par les pouvoirs publics français a tout de même abouti à ce que la lutte contre la discrimination devienne une priorité gouvernementale dès 1998. Ceci s’est notamment traduit par la création des CODAC (Commission Départementale d’Accès à la Citoyenneté), d’un numéro d’appel gratuit (le 114) et par le vote de la loi de novembre 2001, qui a notamment réformé l’article L122-45 du Code du Travail rendant plus efficace la lutte contre la discrimination. La mise en place d’une permanence d’information juridique en droit du travail a été motivée par une hypothèse et un constat : les jeunes peuvent être victimes de formes diverses de discriminations dans le monde du travail ; ils subissent le non-respect de leurs droits de salariés. Ces deux points peuvent compromettre fortement leur insertion professionnelle durable, en les “ dégoûtant ” du monde de l’entreprise. Auparavant, les problèmes liés à la discrimination étaient traités “ au cas par cas ”. Or, les professionnels de l’insertion ne sont pas, pour la plupart, des spécialistes en droit du travail à même d’accompagner les jeunes sur un plan juridique ; et cela n’est pas leur mission. Par l’introduction de l’aménagement de la charge de la preuve, l’extension de la liste des critères discriminatoires et l’élargissement de l’application de ces critères à l’ensemble de la relation contractuelle avec l’entreprise, la loi de novembre 2001, et notamment la réforme de l’article L122-45 du Code du Travail, a soulevé deux questions : - Comment faire connaître cette nouvelle loi aux victimes potentielles de discrimination ? - Selon le nouvel article L122-45 du Code du Travail, toute personne s’estimant victime de discrimination doit apporter des éléments de fait au juge pour qu’une enquête soit diligentée. Cette “ révolution ” dans le droit du travail pose le problème de l’accompagnement des victimes de discrimination dans la constitution du dossier civil voire pénal. Finalité et objectifs Dans l’optique de permettre un accès effectif au droit, la finalité des permanences juridiques est de montrer aux jeunes que le droit et la justice n’ont pas uniquement une fonction répressive ; qu’ils ont aussi une fonction préventive qui vise à les protéger notamment dans le cadre du travail. C’est pourquoi ces permanences sont animées par un juriste spécialisé en droit du travail. Par sa fonction de médiateur entre le jeune et le droit, le juriste occupe une place symbolique qui “ humanise ” et rend accessible la législation relative au monde du travail. Plus concrètement, les permanences ont pour objectifs : - d’accompagner les jeunes se sentant victimes de discrimination au travail, notamment dans la constitution de leur dossier ; - de les appuyer en cas de litige avec leur employeur, dans le but de les maintenir dans leur emploi ; - d’écouter leurs questions sur le droit du travail ; - de jouer le rôle de relais entre les jeunes et leur employeur ou les autres acteurs (inspection du travail, la CODAC). Le maintien du jeune dans son emploi est favorisé au maximum. Le travail du juriste consiste donc à écouter la situation exposée par le jeune, à l’analyser sous l’angle juridique puis à apporter les éléments ou l’argumentaire permettant au jeune de trouver une solution correspondant le plus possible à ses intérêts. Par voie de conséquence la médiation a été l’axe de travail privilégié par le juriste. Bilan Le juriste a rencontré au total 70 jeunes en 2001 et 2002. La majorité d’entre eux ont sollicité ce service pour des litiges avec leurs employeurs. Les jeunes touchés étaient particulièrement fragiles vis-à -vis du monde de l’emploi (sur-représentation des jeunes femmes, très faible niveau de qualification, jeune âge, résidence dans les quartiers dits en difficulté pour la plupart). Souvent les jeunes qui se sont rendus aux permanences se trouvaient en situation de crise, se traduisant par de la colère ou de l’abattement. Le non-respect de la législation à leur encontre les mettait dans une situation particulièrement difficile (difficultés matérielles et/ou psychologiques s’ajoutant à des parcours scolaires et d’insertion professionnelle déjà chaotiques). Ils exposaient leurs problèmes “ en vrac ”, cherchant une solution rapide et des réponses à leurs questions. Avoir ainsi créé un espace d’accueil et d’écoute spécialisé a permis de désamorcer ces situations de crise en leur indiquant qu’ils pouvaient transformer leurs revendications en capacité à agir. Le travail du juriste contribuait à “ dépassionner ” le conflit par un traitement objectif des faits, leur permettant de comprendre exactement ce qui leur arrivait et comment y remédier.