Dans les annĂ©es 50, la ville de Rome a connu une très forte expansion Ă laquelle la municipalitĂ© n’a pas su faire face, ne prĂ©voyant pas par exemple, de rĂ©serves foncières qui auraient permis de rĂ©pondre aux futurs besoins de logements. Ainsi, la population s’est trouvĂ©e dans l’obligation d’acheter Ă des propriĂ©taires privĂ©s des terrains non-constructibles pour y bâtir leur maison. Cette occupation illĂ©gale des terrains a concrètement dĂ©bouchĂ© sur l’organisation d’une vĂ©ritable rĂ©sistance des habitants face aux autoritĂ©s. Des “ quartiers d’irrĂ©ductibles ” ont vu le jour : les Borgate. Ils tirent leur nom de leur histoire. A l’origine ces maisons Ă©taient auto-construites par les populations modestes et les briques ayant servi Ă leur Ă©dification Ă©taient fabriquĂ©es par les femmes de maçons, charpentiers et autres artisans. Afin de rendre hommage Ă ces femmes, les quartiers ont Ă©tĂ© nommĂ©s Borgata ou “ bourg ”, de genre fĂ©minin en italien. De nos jours, on dĂ©nombre plus de 800 000 habitations dites “ abusives ”, qui sont aujourd’hui aussi le fait des classes moyennes et de l’implication militante de ses habitants. Après l’organisation d’actions collectives pour la construction des logements, une autre lutte administrative, juridique et politique a pris le relais. Au dĂ©part, ces quartiers nĂ©s spontanĂ©ment n’étaient pas reliĂ©s aux services urbains, indispensables Ă leur fonctionnement. L’accès Ă l’eau, au gaz, Ă l’électricitĂ©, aux transports, sont autant de besoins fondamentaux pour lesquels les habitants doivent encore aujourd’hui se battre, notamment en manifestant rĂ©gulièrement devant le siège de l’arrondissement ou de la mairie pour obtenir gain de cause. A ce combat, s’est ajoutĂ©e la lutte pour la reconnaissance officielle du quartier et de ses habitants comme citoyens Ă part entière, jouissant du droit de vote et de celui de participer Ă la vie politique. Avec l’Unione Borgate qui a fĂ©dĂ©rĂ© toutes les Borgate, l’union a vraiment fait la force. FondĂ©e en 1975, ses objectifs sont au nombre de 4 : - faire reconnaĂ®tre les logements dits “ abusifs ”, construits par nĂ©cessitĂ© ; - faire de la pĂ©riphĂ©rie un grand quartier de requalification urbaine pour combler le dĂ©ficit en infrastructures et en services entre le centre et la pĂ©riphĂ©rie ; - lutter contre la spĂ©culation foncière ; - transformer les habitants en acteurs de la rĂ©habilitation de leur quartier. La forte mobilisation des habitants a fait de l’Unione Borgate une organisation puissante avec laquelle les pouvoirs publics ont dĂ» prendre l’habitude de nĂ©gocier. Des victoires ont ainsi pu ĂŞtre enregistrĂ©es. L’une des plus importantes est d’avoir rĂ©ussi Ă faire voter une loi en 1993 autorisant chaque Borgate, constituĂ©e en association locale, Ă collecter la taxe d’habitation et Ă la gĂ©rer elle-mĂŞme. L’association peut, dès lors, prendre collectivement des dĂ©cisions concernant l’équipement du quartier, avec l’appui de professionnels. Dans la Borgate du quartier d’Ostie, les habitants ont ainsi crĂ©Ă© un Centre Social, proposant toutes sortes d’activitĂ©s Ă la communautĂ©. Ils en assument seuls le fonctionnement et la gestion.