Comité Pro Parque Miraflores
1 L’expérience du parc Miraflores a été développée dans un quartier de Séville qui s’est construit de manière très rapide et chaotique, à la fin des années 70. Les immeubles ont été construits sur d’anciennes zones agricoles, qui étaient en majorité composées de champs d’oliviers et de cortijos . 2 En 1983, est officiellement né le « Comité Pro Parque Miraflores », même si les habitants avaient commencé à se réunir et s’organiser de manière informelle avant cette date. L’objectif du Comité était de mobiliser les habitants autour de la construction d’un parc qui réponde à leurs nécessités et selon un processus qui favorise la participation de chacun. 3 La mobilisation qui s’est peu à peu amorcée, visant à forcer les pouvoirs publics à respecter leurs engagements, va finalement durer plus de 20 ans. Elle peut être analysée en 3 grandes étapes. 4 La première étape a été centrée sur l’accomplissement d’un travail de recherche et d’investigation. Un groupe d’habitants s’est investi pour mieux connaître et comprendre son environnement, alors composé de terrains vagues recouverts des décombres laissés après la construction des immeubles et de quelques espaces faisant l’objet de spéculations immobilières. Cette étape a été essentielle dans la construction de la lutte. Les habitants utilisèrent divers domaines de compétences : la géographie, l’archéologie, l’histoire, mais aussi le droit. Ils sont parvenus à récupérer les plans urbains de la zone et se sont rendus compte que sur les terrains recouverts de décombres avait été prévue quelques années auparavant la construction d’un parc. La découverte et l’analyse de toutes ces informations ont été à l’origine de la forte mobilisation des habitants du quartier. 5 C’est ainsi qu’a débuté la deuxième étape, axée sur l’action collective des habitants face aux responsables municipaux, propriétaires du terrain, pour obtenir la récupération de ce dernier et la construction d’un parc visant à apporter des solutions aux problèmes du quartier : désoccupation des gens, chômage et difficulté d’insertion des jeunes, violences, etc. 6 Les stratégies d’actions mises en place pour atteindre cet objectif furent diverses, passant notamment par l’occupation du terrain en question. En réponse aux responsables municipaux qui prétendaient qu’il n’avait jamais été prévu de parc à cet endroit-là et que la construction était impossible, les habitants, au cours de leurs occupations, se sont mis à planter des arbres, afin de démontrer le contraire. 7 Face à ces actions répétées, mobilisant un grand nombre de gens du quartier, la municipalité s’est finalement engagée à laisser l’espace à disposition pour la construction d’un parc, permettant ainsi la mise en oeuvre de projets portés par les habitants et visant à faire de ce lieu un lieu d’action citoyenne et d’utilité sociale. 8 Les habitants sont ainsi passés d’une phase de lutte pour la récupération et l’utilisation d’un territoire à une phase davantage centrée sur la gestion de celui-ci. 9 Au cours de cette troisième phase divers projets ont ainsi été développés : mise en place de jardins potagers pour les familles et les élèves des écoles, création de l’école d’apprentissage pour les jeunes du quartier (formation en menuiserie, peinture, plomberie, mécanique, …), remise en état de monuments à valeur archéologique (vieux moulin, systèmes antiques d’irrigation, etc.), montrant l’intérêt culturel d’une zone que les responsables municipaux estimaient dépourvue de valeur historique. 10 Durant cette phase, les habitants ont dû élaborer leurs propres règles de fonctionnement pour que les projets puissent marcher. Les voisins ont ainsi décidé du mode d’attribution des jardins potagers. Cela se fait par tirage au sort. Chaque personne dispose d’une parcelle de 150 m2 dont les produits sont destinés à sa consommation personnelle (et non à la vente). Lorsque l’un des exploitants décède ou lorsqu’il n’exploite pas suffisamment sa parcelle, elle fait l’objet d’une nouvelle ré-attribution par tirage au sort. 11 Cette étape a aussi été consacrée, au-delà de la simple gestion, à obtenir les garanties d’une protection de ce que les habitants avaient conquis au cours des étapes précédentes. 12 L’un des premiers moyens utilisés a consisté à inscrire le parc et ses projets dans un projet européen appelé POMAL. Le parc bénéficiait ainsi de fonds européens, obligeant les pouvoirs publics à respecter leurs engagements et continuer à participer à la construction des infrastructures du parc. 13 Le second moyen trouvé pour protéger le parc a consisté à utiliser le droit existant pour obtenir un statut juridique particulier. C’est ainsi que les habitants ont décidé d’entreprendre les démarches pour faire reconnaître le parc comme « bien d’intérêt culturel », statut permettant d’une part de le protéger contre les promoteurs immobiliers et d’autre part d’obtenir des financements pour le garder en état. L’obtention de ce statut protecteur a notamment été possible grâce à tout le travail de recherche et d’investigation entrepris depuis le départ et permettant de démontrer la valeur historique, culturelle, ethnologique du parc. 14 Aujourd’hui, les habitants essaient de transmettre ce processus de lutte aux nouveaux arrivants, aux jeunes, aux visiteurs du parc, ... Cette transmission se fait notamment au travers des itinéraires pédagogiques. Ces balades servent non seulement à sensibiliser les gens sur l’importance de la culture, de la biodiversité, ... mais également sur tout le processus de lutte qui a permis de récupérer cet espace et d’y développer des projets. Une exposition a ainsi été conçue et installée dans l’un des bâtiments récupérés et remis en état par les habitants. Elle retrace les différentes étapes de la lutte et les moyens d’action utilisés, articles de presse et plans de la zone à l’appui.