SOC / Sindicato de los Obreros del Campo
1 Né en 1976, le SOC s’est, au départ, davantage constitué comme un mouvement socio-politique, centré sur la lutte, que comme un syndicat traditionnel. Les militants du SOC se sont toujours placés dans une dynamique d’action. 2 Le SOC est implanté dans l’ensemble de l’Andalousie. Dans cette région, les terres appartiennent à quelques grands propriétaires, qui emploient pour les exploiter des ouvriers agricoles. Les activités du SOC sont mises en place directement dans les villes et villages où le syndicat est implanté : permanences juridiques, information et formation, développement de projets économiques et sociaux, …. Le syndicat emploie 4 avocats, personnes ressources pour les actions judiciaires menées et la défense des militants. Le fonctionnement du syndicat reste très informel et totalement horizontal : les actions, les orientations prises sont décidées au cours d’assemblées de travailleurs. 3 Dans la plupart des cas, ses membres ne peuvent cependant pas se présenter lors des élections syndicales. Pour être élus et participer au vote, les travailleurs doivent, en effet, disposer d’un contrat de travail de 6 mois minimum. Cette réglementation ne prend pas en compte la réalité agraire de la région : les ouvriers agricoles ne restent pratiquement jamais 6 mois chez le même employeur. La loi ne permet donc pas au SOC de les représenter. Dans certaines zones, il constitue le syndicat qui dispose du plus d’adhérents mais il ne peut légalement avoir aucun délégué. 4 Les axes de travail du syndicat se sont petit à petit multipliés : la mobilisation a d’abord été centrée sur la question de l’emploi puis sur l’accès à la terre, le développement de projets à l’échelle de chaque village (en matière d’écologie, d’éducation, de santé, etc.). 5 Les modes d’action du syndicat sont tous tournés vers l’action collective directe. Lorsqu’un employeur ne remplit pas ses engagements vis-à -vis d’un travailleur (il ne le paie pas ou moins que ce qui avait été convenu), tous les travailleurs de l’exploitation se mettent en grève. Le syndicat est souvent obligé de mener des actions hors du cadre légal pour pouvoir agir de manière efficace et faire valoir des droits fondamentaux des travailleurs. Quand une manifestation est décidée lors d’une assemblée, elle a lieu même si la déclaration ne peut se faire dans les délais légaux et selon les modalités requises. Le recours à des moyens d’action considérés comme illégaux par le droit formel est mis en opposition à la légitimité des revendications du SOC. 6 Le SOC a toujours été actif dans la lutte pour l’accès à la terre. Il existe en effet en Espagne une loi de réforme agraire qui permet d’obtenir l’expropriation de grands propriétaires qui n’exploitent pas leurs terres ou une partie de celles-ci, mais elle n’est pas appliquée. 7 Cette lutte passe principalement par la mise en place d’actions d’occupation. De nombreuses occupations de terres, publiques ou privées (appartenant à de grands propriétaires), ont été et sont encore menées par les militants du SOC. Certaines sont organisées pour une courte durée (quelques jours) et répétées à plusieurs reprises. D’autres peuvent être menées pendant plusieurs années. La préparation de toutes les actions est importante, particulièrement quand il s’agit d’une action de longue durée, où il faut mettre en place des solidarités permettant aux familles participant à l’occupation de vivre pendant cette période. 8 Pour ne pas tomber dans la contradiction entre lutter contre le droit à la propriété privée et revendiquer cette même propriété, le SOC se donne pour objectif de n’obtenir que le droit d’exploiter la terre. Généralement, ce sont les pouvoirs publics qui deviennent propriétaires de la terre (la Mairie dans la plupart des cas) et une convention est signée avec le SOC pour lui en laisser la gestion. Les militants mettent alors en place des coopératives permettant de gérer collectivement les terres, avec un objectif social. 9 Le choix de cette ligne d’action n’est pas sans conséquences pour les militants du syndicat. Même si les actions menées sont toujours non-violentes, le SOC est le syndicat qui fait l’objet du plus de procédures judiciaires en Espagne. Les motifs des inculpations sont divers : grève illégale (non déclarée dans les formes), atteinte aux droits des travailleurs, ... Dans la majorité des cas, les militants, défendus par les avocats du SOC, sont dispensés de peine ou reçoivent des peines symboliques en arrivant à démontrer le caractère légitime de leur action. Un exemple particulier de lutte pour la terre : la Marinaleda 10 Cette lutte visait à obtenir l’expropriation d’une partie des terres appartenant à un grand propriétaire terrien. Les militants ont décidé d’utiliser une vieille loi, oubliée de l’administration, selon laquelle quand une partie des terres est irriguée, une autre partie peut faire l’objet d’une expropriation. Les terres en question n’étant pas irriguées, le SOC a commencé par se mobiliser pour obtenir leur irrigation, en occupant un bassin de rétention d’eau. 11 A la suite de cette première action a débuté une série d’occupations d’une partie de ces terres, dont certaines ont duré plusieurs mois. Simultanément, les militants organisaient des actions à Séville afin de se rendre plus visibles et de toucher les pouvoirs publics là où ils se trouvent. 12 Toutes ces actions furent fortement réprimées. A chaque occupation, les militants étaient délogés par la police et certains inculpés. Parallèlement à l’organisation d’actions collectives, il a donc également fallu organiser la défense des militants. 13 Cette lutte fut particulièrement longue et intense, puisque ce n’est qu’au bout de 8 ans que le ministre de l’agriculture a procédé à l’expropriation des 1 200 hectares revendiqués par le SOC.