Solidarités Nouvelles
1 SolidaritĂ©s Nouvelles est une association sans but lucratif (asbl) nĂ©e en 1973 en Belgique. CrĂ©Ă©e au dĂ©part pour rĂ©pondre Ă des questions sur les logements sociaux, son champs d’action s’est peu Ă peu Ă©largi Ă toutes les questions concernant le logement. SolidaritĂ©s Nouvelles a aujourd’hui comme objectif principal d’appuyer les personnes pour qu’elles puissent faire valoir leurs droits en matière de logement. L’association agit aux cĂ´tĂ©s des personnes en situation de prĂ©caritĂ©, sans jamais se mettre Ă leur place. Les 7 salariĂ©s de l’association et les bĂ©nĂ©voles n’ont pas de formation juridique spĂ©cifique. Ils ont tout appris lors des permanences juridiques. Sur le terrain du droit, SolidaritĂ©s Nouvelles a dĂ©veloppĂ© diffĂ©rentes expĂ©riences. Permettre une approche concrète du droit Inviter Ă des rencontres entre habitants et professionnels du droit : l’expĂ©rience de « Justice en mouvement » 2 « Justice en mouvement » est une expĂ©rience engagĂ©e par SolidaritĂ©s Nouvelles en 1997. Elle s’est dĂ©roulĂ©e sur 3 ans. Il s’agissait d’aider des citoyens en situation de prĂ©caritĂ© Ă exprimer les difficultĂ©s qu’ils rencontraient face Ă la justice : comprendre une procĂ©dure judiciaire, savoir se faire entendre sans forcĂ©ment ĂŞtre reprĂ©sentĂ© par un avocat, etc. Des ateliers ont ainsi Ă©tĂ© mis en place sur diverses thĂ©matiques en confrontant directement les personnes Ă des juges de paix, des juristes, des avocats, etc. Cette expĂ©rience a permis aux professionnels du droit et aux habitants de mieux connaĂ®tre les rĂ©alitĂ©s des uns et des autres, de faire tomber certains prĂ©jugĂ©s et de dĂ©mystifier le monde de la justice. Le travail autour de la rĂ©glementation sur le permis locatif 3 Une loi belge d’octobre 1998 prĂ©voit l’exigence d’un permis de location pour des logements de 28 m2 ou moins. Ces logements doivent rĂ©pondre Ă des critères minimaux de qualitĂ© (salubritĂ©, superficie habitable, nombre de pièces…). Ce permis locatif doit ĂŞtre dĂ©livrĂ© par l’administration communale, sur demande du propriĂ©taire. 4 SolidaritĂ©s Nouvelles a constatĂ© que cette loi pouvait avoir des effets nĂ©fastes, notamment en ce qui concerne les logements pour lesquels les propriĂ©taires ne disposaient pas de ce permis. Ces logements sans permis locatif Ă©taient en effet considĂ©rĂ©s comme ne pouvant pas ĂŞtre lĂ©galement louĂ©s et le bail signĂ© entre le locataire et le propriĂ©taire n’était pas valable. Cette situation avait pour consĂ©quence de mettre le locataire en situation très prĂ©caire puisqu’il pouvait perdre son logement du jour au lendemain. La loi avait Ă©galement pour consĂ©quence de faire disparaĂ®tre les logements de petite taille, pourtant nĂ©cessaires Ă bon nombre de personnes disposant de ressources modestes. 5 L’un des ateliers organisĂ©s dans le cadre de « Justice en mouvement » a portĂ© sur cette problĂ©matique et des actions de sensibilisation des juges et de l’opinion publique ont Ă©tĂ© menĂ©es. La jurisprudence a fini par Ă©noncer clairement qu’un locataire ne disposant plus de bail faute de permis locatif pouvait attaquer le propriĂ©taire en justice afin de toucher des dommages et intĂ©rĂŞts et rĂ©cupĂ©rer les loyers indĂ»ment perçus du fait de l’absence de contrat. Grâce Ă cette sensibilisation, le critère de mĂ©trage permettant de dĂ©clarer un appartement impropre Ă la location a Ă©tĂ© assoupli. De petits logements respectant les critères de salubritĂ© ont pu rester sur le marchĂ© de la location. 6 SolidaritĂ©s Nouvelles a Ă©galement publiĂ© une brochure qui explique clairement le dĂ©cret relatif au permis locatif, en mettant en garde contre certains de ses effets et en soulignant les contradictions de certaines de ses applications. Cette brochure a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e Ă la RĂ©gion wallonne afin que celle-ci procède Ă une relecture du projet en portant une attention particulière aux points et questions soulevĂ©s par l’association. Elle sert aussi d’outil de travail lors de rencontres organisĂ©es avec les instances communales avec lesquelles collabore SolidaritĂ©s Nouvelles. De l’action individuelle Ă l’action collective : les permanences 7 SolidaritĂ©s Nouvelles propose des permanences d’accueil gratuites sur les questions liĂ©es au logement. Lorsque le problème exposĂ© est un problème individuel, l’association donne des informations, oriente ou propose un accompagnement. 8 Mais ces permanences sont souvent l’occasion d’identifier des problèmes collectifs rĂ©currents dans certains endroits oĂą se dĂ©veloppent des pratiques abusives. Dans ce cas de figure, l’association essaie d’inciter les gens Ă participer Ă des « groupes d’action droit au logement ». Au sein de ces groupes de parole collectifs, les personnes sont amenĂ©es Ă prĂ©senter leur situation, dans l’objectif de pouvoir faire valoir leurs droits. 9 Ces groupes reprĂ©sentent une concrĂ©tisation d’un des objectifs essentiels de l’association. En effet, afin de susciter de nouvelles solidaritĂ©s, le prĂ©alable est de rĂ©unir sur le terrain des partenaires sociaux prĂ©occupĂ©s de promouvoir le droit au logement et surtout des personnes vivant des situations qui sont en contradiction avec ce droit. Il importe de changer le regard sur le droit : mieux comprendre sa situation, les rĂ©glementations/lĂ©gislations applicables, les outils lĂ©gaux disponibles, leurs limites, etc tout en s’appuyant sur l’expĂ©rience d’autres participants. Il s’agit aussi d’établir d’une relation avec les « professionnels » du travail social et d’entrer dans une construction commune. C’est pourquoi ces derniers soutiennent l’émergence et l’organisation de tels groupes dans diffĂ©rents centres urbains. Ils tentent Ă©galement d’établir des contacts avec diffĂ©rents groupes existants. 10 Les permanences ont par exemple permis Ă SolidaritĂ©s Nouvelles de se mobiliser sur le problème des « habitants permanents » en parcs rĂ©sidentiels ou en campings. De nombreux rĂ©sidents avaient fait appel Ă l’association car n’ayant pas de bail, ils ne bĂ©nĂ©ficiaient pas du statut de locataire et Ă©taient victimes des abus de certains propriĂ©taires de camping. SolidaritĂ©s Nouvelles s’est battue en organisant des collectifs (habitants et associations) pour qu’un cadre lĂ©gislatif soit adoptĂ© afin de rĂ©glementer la situation des habitants permanents. Un arrĂŞtĂ© a finalement Ă©tĂ© pris. Un plan dĂ©nommĂ© « HP » (habitat permanent) a Ă©tĂ© lançé en 2004. Il donne la possibilitĂ© aux administrations communales de mettre en place une antenne sociale s’il y a trop d’habitants permanents et de dĂ©signer un agent de concertation pour faire le lien entre les habitants permanents et les autoritĂ©s. Dans ce cadre, l’association sert de relais et de lien entre les pouvoirs publics et les personnes afin que leur voix soit entendue. 11 Toutes ces mobilisations, par le biais d’actions collectives ou individuelles, ont fini par avoir des incidences sur le droit. Des jugements ont Ă©tĂ© rendus en faveur de personnes en situation de prĂ©caritĂ©, des plaintes ont Ă©tĂ© abandonnĂ©es… Les mobilisations collectives (pĂ©titions, manifestations, …) permettent aussi aux gens de se rendre compte qu’ils ne sont pas les seuls Ă vivre ces problèmes. Ils se sentent moins isolĂ©s dans leur lutte et retrouvent leur dignitĂ©. La mĂ©diation paritaire 12 Il s’agit d’une expĂ©rience menĂ©e par SolidaritĂ©s Nouvelles, l’Agence Immobilière Sociale (AIS) de Charleroi, le Centre Public d’Action Sociale (CPAS) la Ville de Charleroi, le Fonds du Logement des Familles Nombreuses, le SEPI (Immobilière) et le Syndicat National des PropriĂ©taires (SNP). Cette initiative tente d’aider les locataires qui ont gĂ©nĂ©ralement peur d’aller en justice en cas de litige avec leur propriĂ©taire. 13 La mĂ©diation paritaire propose une alternative : une nĂ©gociation entre un reprĂ©sentant des propriĂ©taires (le SEPI, le SNP ou l’AIS) et un reprĂ©sentant des locataires (SolidaritĂ©s Nouvelles ou le CPAS). Lorsque le locataire est victime d’un abus flagrant de la part du propriĂ©taire, l’association insiste pour qu’il aille en justice. En revanche, la mĂ©diation est proposĂ©e au locataire lorsque les deux parties ont des Ă©lĂ©ments Ă faire valoir et qu’une nĂ©gociation est possible. On essaie alors de trouver un terrain d’entente entre les deux. L’association reprĂ©sentant le locataire prĂ©sente un dossier au reprĂ©sentant du propriĂ©taire, lequel choisit d’accepter ou non la mĂ©diation. Les deux parties ainsi que leurs reprĂ©sentants respectifs sont prĂ©sents. Si une entente est trouvĂ©e entre le propriĂ©taire et le locataire, un suivi est alors prĂ©vu afin de contrĂ´ler l’application du compromis. Si la mĂ©diation n’aboutit pas, une autre rencontre peut ĂŞtre proposĂ©e, le cas Ă©chĂ©ant en prĂ©sence d’un juriste chargĂ© d’informer sur les dispositifs lĂ©gaux et les implications d’un Ă©ventuel jugement. Faire Ă©voluer le droit au niveau rĂ©gional ou national 14 La ville de Charleroi a rĂ©cemment dĂ©cidĂ© de rĂ©glementer la mendicitĂ© en Ă©laborant des projets d’arrĂŞtĂ©s municipaux « anti-mendicitĂ© ». la prĂ©vision de cette nouvelle rĂ©glementation a soulevĂ© de vives rĂ©actions, notamment parmi la population la plus dĂ©munie. C’est l’une des premières fois que ces personnes se sont mobilisĂ©es et organisĂ©es, exigeant le retrait des projets d’arrĂŞtĂ©s. Ils ont fait signer aux habitants de la ville des pĂ©titions pour que cette question soit inscrite Ă l’ordre du jour du conseil municipal et ont obtenu gain de cause. Un dĂ©bat public a ainsi eu lieu et les projets ont finalement Ă©tĂ© retirĂ©s. 15 SolidaritĂ©s Nouvelles intervient Ă©galement au sein du RĂ©seau Wallon de Lutte contre la PauvretĂ©, qui rĂ©alise actuellement un travail sur l’accès au droit et Ă la justice. Ce travail, lancĂ© en 2004, comprend 3 phases : une première phase consacrĂ©e au recueil de la parole les gens : « quand on parle du droit, qu’est ce que cela Ă©voque chez vous ? » ; une seconde phase consacrĂ©e Ă l’analyse de ces tĂ©moignages au travers de 3 thèmes principaux : l’emploi, la santĂ© et le logement ; une troisième phase consacrĂ©e Ă l’élaboration de propositions. 16 L’association a Ă©galement Ă©tĂ© sollicitĂ©e au moment de la refonte du Code wallon du logement. Elle a pu faire une analyse critique des divers amendements proposĂ©s. Elle participe au Conseil supĂ©rieur du logement. En divers lieux, elle est rĂ©gulièrement invitĂ©e Ă faire Ă©tat de ses rĂ©flexions sur la rĂ©alitĂ© de terrain confrontĂ©e Ă la lĂ©gislation. L’intĂ©rĂŞt est de pouvoir porter la parole des gens dans les instances chargĂ©es d’élaborer et d’évaluer le droit.