Service Droit des Jeunes de Bruxelles
1 Le Service Droit des Jeunes (SDJ) est un service social d’aide aux jeunes et aux familles en difficulté qui utilise le droit comme outil de travail social. Le premier SDJ est né en 1978 en Belgique. Il en existe désormais 4 sur le territoire belge. Le SDJ développe différents types d’actions : Les permanences d’accueil et l’aide individuelle 2 L’un des objectifs du SDJ est d’apporter une aide individuelle aux jeunes et aux familles. Cette aide peut relever de la simple information, de l’appui pour faire valoir des droits devant les tribunaux ou dans les relations avec l’administration, de l’accompagnement à l’accomplissement de démarches, etc. Le SDJ joue également dans certains cas le rôle d’interface dans les relations des jeunes avec certains acteurs, notamment les avocats (certains jeunes viennent au SDJ parce qu’ils ne comprennent pas un courrier qui leur a été adressé par leur avocat). 3 Les situations rencontrées sont très diverses : jeunes victimes d’exclusion sociale, contestation d’une décision d’exclusion d’une école, fugue, problème par rapport au séjour des étrangers, accès aux droits sociaux, … 4 Les actions d’aide et d’accompagnement sont réalisées par une équipe de 6 personnes, juristes, travailleurs sociaux ou criminologues. Chaque intervenant traite tout type de dossier et doit se former aux techniques des autres (formation réalisée en interne). Le jeune qui arrive rencontre indifféremment l’une ou l’autre personne. 5 L’idée à la base des actions du SDJ c’est d’utiliser le droit comme outil pour que les gens puissent faire face à leurs problèmes, améliorer leur situation. Dans leur méthodologie d’action, les intervenants du service font attention à rendre les choses plus compréhensibles et transparentes pour que les jeunes et leur famille puissent être acteurs et fassent leurs propres choix. Les différentes pistes d’action, légales ou non, leur sont toujours présentées avec les avantages et les inconvénients de chacune, mais ils restent maîtres de la décision. Le service considère que le dossier des jeunes ou des familles constitué par le SDJ est leur propriété. Ils peuvent donc venir à tout moment le consulter, faire des copies ; ils reçoivent également copie de tout document reçu ou envoyé. Dans ce même esprit, le SDJ estime qu’il n’a de compte à rendre qu’à la personne qui est venue le consulter et agit dans le respect le plus sérieux du secret professionnel. C’est à la personne concernée de transmettre les informations qu’elle souhaite à l’extérieur. 6 Lorsque le SDJ juge qu’il n’est pas compétent pour résoudre le problème, il renvoie vers d’autres services, en faisant toutefois attention à ne pas se désister trop facilement, en se posant pour chaque cas la question de savoir si un autre service aura des compétences différentes de celles du SDJ et sera plus en capacité de résoudre le problème. Ceci pour éviter de renvoyer les jeunes et leur famille de guichet en guichet. 7 Le SDJ ne mène pas d’action thérapeutique mais ses actions ont un effet thérapeutique : obtenir un logement décent pour une famille a par exemple un impact sur les relations familiales, la santé mentale des gens. Les actions juridiques collectives 8 Lorsque des problèmes récurrents sont rencontrés dans les permanences, que ces problèmes ne sont pas d’ordre individuel (problème relatif à une réglementation inadéquate ou archaïque, un positionnement des pouvoirs publics, une application des lois déficiente, …), le SDJ essaie d’agir en élaborant des constats, en évaluant la situation par rapport à une problématique définie. 9 La multiplication des exclusions dans les établissements scolaires a par exemple amené le SDJ à mettre en place des tables rondes pour rassembler différents acteurs de l’enseignement. Les conclusions de ces tables rondes ont été transmises aux responsables politiques pour alimenter leur réflexion et essayer d’influer sur la législation. Des conférences de presse sont également parfois organisées. 10 De même, face à l’inadaptation de la réglementation sur les mineurs non-accompagnés, et à l’inaction des services sociaux, le SDJ a été à l’initiative de la mise en place d’une plate-forme de différents services intitulée « plate-forme mineurs en exil ». 11 Le SDJ souligne qu’il est sans doute dans ce type d’action, davantage dans une perspective d’appropriation du droit par le service lui-même que par les gens. Certaines actions sont cependant menées dans un esprit d’appropriation du droit par les jeunes ou les familles. Il s’agit alors plutôt de soutenir des actions existantes que d’en initier. 12 Par exemple, des jeunes rattachés à une maison des jeunes se trouvaient confrontés à des problèmes récurrents avec la police : contrôles d’identité permanents, fouilles qui dégénéraient, etc. Le SDJ a réalisé des séances d’information collectives sur les droits et devoirs des jeunes face à la police. Les jeunes se sont rendus compte que leurs droits n’étaient pas toujours respectés. Ils ont pris rendez-vous avec les autorités de police locale pour en discuter et la situation s’est améliorée, la tension a diminué. Malheureusement, cette expérience n’a pas été transmise aux plus jeunes et cette action serait à renouveler aujourd’hui. 13Autre exemple : un collectif d’usagers d’un centre public d’action social (CPAS) rencontrait des difficultés par rapport au fonctionnement de l’un de ces centres (files d’attentes à l’infini, rendez-vous impossibles à obtenir avec les travailleurs sociaux, …). Un cahier de doléances a été rédigé et des rendez-vous ont pu être obtenus avec le directeur du centre. 14 La plupart du temps, les actions juridiques collectives produisent des effets : en ce qui concerne les procédures disciplinaires dans l’ordre scolaire, la loi a par exemple été modifiée (adoption du principe de proportionnalité de la sanction, procédure obligatoire pour tous, …). Mais elles peuvent aussi avoir des effets pervers : aujourd’hui, le respect d’une certaine procédure n’est finalement souvent qu’une formalité, la décision d’exclusion est généralement prise avant le déroulement de la procédure alors que cette dernière doit permettre de prendre le temps de la réflexion, de limiter l’arbitraire, etc. Si la situation a donc évolué au niveau formel, ce n’est pas forcément le cas au niveau des consciences… 15 De même, la loi sur la tutelle des mineurs non-accompagnés est passée, on a créé des centres d’accueil spécifiques pour ces jeunes. Mener des actions en justice 16 A partir de certaines situations individuelles, le SDJ a mené des actions en justice (exemple des procédures scolaires : jurisprudence établissant un droit commun des sanctions disciplinaires). Dans ces affaires, même si les personnes concernées obtiennent gain de cause, la décision n’est pas forcément très positive pour eux, car elle intervient souvent plusieurs années après les faits (en cas d’expulsion d’un établissement, le jeune est déjà dans un autre établissement). Le SDJ informe donc précisemment les personnes lorsqu’il souhaite utiliser une situation individuelle pour obtenir des résultats collectifs. Les personnes sont souvent sensibles au fait que leur cas peut servir à d’autres. On ne sacrifie cependant jamais une situation individuelle pour une action collective. 17 L’une des avancées jurisprudentielles intéressantes obtenue a été de faire reconnaître le droit d’action de l’association SDJ dans les procédures concernant des mineurs étrangers devant les juridictions civiles. Pour agir devant ces juridictions, il faut en effet prouver que l’on dispose d’un intérêt personnel et direct à agir (sauf pour les associations de défense de l’environnement et de lutte contre le racisme). La Cour a admis l’argument du SDJ défendant l’idée que les mineurs étrangers étaient un public qui, s’il n’était pas représenté par une association, n’avait pas de possibilité d’action. 18 Les actions judiciaires sont le plus souvent menées en interne, sauf dans certains cas où il est fait appel à des avocats extérieurs, notamment pour des procédures très spécifiques. La diffusion de l’information 19 L’objectif des publications est de rendre le droit accessible à des professionnels non-juristes, notamment de faire en sorte que les décisions de jurisprudence soient plus compréhensibles, lisibles et accessibles. 20 Certaines publications du SDJ sont destinées aux jeunes eux-mêmes et visent à répondre à leurs questions : par exemple « 100 questions sur la police », ouvrage « de mineurs » (livre sur la justice des mineurs adressé aux jeunes sous la forme d’un « livre dont vous êtes le héros »), etc.